Imaginez rentrer épuisé d’une longue journée, l’estomac dans les talons, pour découvrir que votre frigo s’est transformé en arène de boxe… et que votre reste de burger moisi vous cherche des noises. Leftovers KO!, développé par Mountain Man Animation et édité par Feardemic (habitué des titres d’horreur, ici en terrain humoristique), est un hommage punchy à la légende Punch-Out!! des années NES. Ce jeu d’action hand-drawn vous met dans la peau de Jay, un travailleur ordinaire confronté à une révolte culinaire aussi hilarante qu’impitoyable. Après plusieurs K.O. cuisants, voici un décryptage de ce combat épique contre la faim… et la moisissure.
Quand ton dîner te défie en duel
Mountain Man Animation signe ici une première incursion dans le jeu vidéo avec une identité visuelle forte. Leur expertise en animation hand-drawn transparaît dans chaque coup de poing et grimace de nourriture avariée. L’humour absurde et l’attention aux détails (comme les condiments qui tombent du frigo lors des impacts) révèlent un studio qui assume son amour des classiques rétro tout en y insufflant une folie unique.
Jay, ouvrier exténué, décide de rentrer chez lui plutôt que de commander à manger. Erreur fatale : dans son frigo, un burger moisi a pris vie, rongé par la rancœur d’avoir été abandonné. Suivi par d’autres aliments tout aussi rancuniers (des légumes aux sushis), il déclare la guerre à Jay. Leur motivation ? Éviter la poubelle en vous envoyant d’abord au tapis. Votre mission : survivre à cette insurrection gastronomique et percer le mystère de cette malédiction culinaire.
Le gameplay de Leftovers KO! s’inspire sans détour de Punch-Out!!, reprenant sa vue subjective et son système de combat basé sur l’esquive, le contre et la gestion du rythme. Le joueur doit esquiver les coups ennemis à gauche ou à droite à l’aide de la croix directionnelle — plus précise que le stick — ou les bloquer en position basse. Les attaques se divisent en coups de poing standards, uppercuts via une combinaison directionnelle, et Power Punch déclenchés par une touche spécifique. Sally, la petite amie du héros Jay, intervient pendant les combats pour expliquer la mécanique des étoiles, que l’on accumule en parant les assauts. Ces étoiles permettent ensuite de lancer des contres dévastateurs si le joueur réussit à trouver le bon moment, juste après une attaque adverse.
Deux jauges sont à surveiller de près : la santé, représentée en blanc, et la stamina, en rouge. Frapper frénétiquement vide rapidement cette dernière, rendant Jay lent, essoufflé et donc vulnérable. Se faire toucher réduit aussi la stamina, accentuant encore la tension et les erreurs potentielles dans une spirale descendante.
La maniabilité demande une précision extrême qui frôle parfois la frustration. Une seule frame de retard sur une esquive peut suffire à se prendre un coup en pleine face. De même, les contres au Power Punch exigent un timing parfait, sans aucune aide visuelle pour guider le joueur. À cela s’ajoute une mécanique originale mais périlleuse : répondre à un appel de Sally pendant un combat via un bouton dédié. Ce geste, mal placé, interrompt le rythme du match et peut précipiter une défaite.
Leftovers KO! affiche fièrement sa difficulté à l’ancienne, assumant une approche « NES-hard ». Le moindre round perdu entraîne un game over immédiat, sans possibilité de rattrapage. Les adversaires reviennent systématiquement avec leur barre de vie pleine, ne laissant aucune place à l’erreur.
Un frigo qui prend vie
Leftovers KO! se distingue avant tout par son univers graphique singulier. Entièrement dessiné à la main, le jeu propose un style 2D expressif et bourré de personnalité. Les ennemis, tous sortis d’un frigo déjanté, prennent vie avec humour et originalité : un burger aux yeux injectés de rage, des légumes aux allures étrangement séduisantes, tout est pensé pour amuser autant que surprendre. Les animations sont à la hauteur, avec des impacts qui font trembler les bouteilles d’eau en arrière-plan ou voler les condiments dans un chaos savamment orchestré. Le décor – frigo, plans de travail, étiquettes et même choix des langues représentées par des icônes alimentaires comme un sushi pour le japonais – fourmille de petits détails qui renforcent l’identité du jeu. Sur le plan technique, la version Switch (et Switch 2) assure une fluidité constante, sans pour autant repousser les limites graphiques de la console.
Côté sonore, le bilan est plus contrasté. La bande originale, rythmée et bien calée sur l’action, soutient l’ambiance avec efficacité. En revanche, les bruitages laissent à désirer. Les coups manquent d’impact : leur son rappelle davantage un jouet mou qu’un vrai poing, et les effets d’impact sur Jay sonnent étouffés, presque absents. Cela nuit à la sensation de puissance que devrait transmettre ce type de jeu. Quelques doublages légers, comme les interventions téléphoniques de Sally ou les grognements des adversaires, ajoutent une touche d’humour bienvenue mais restent anecdotiques.
La durée de vie est volontairement courte, mais ne vous y trompez pas : la difficulté s’avère redoutable. Dès le premier combat contre le burger, le jeu exige une précision presque chirurgicale. Les boss suivants, comme les légumes ou les sushis, introduisent des patterns de plus en plus complexes, transformant chaque victoire en exploit. Aucun mode de difficulté n’est proposé, et la salle d’entraînement, bien que pratique pour affiner ses timings, ne suffit pas à adoucir la rudesse du gameplay. Pour les joueurs les plus téméraires ou les nostalgiques de Punch-Out!!, le défi peut justifier quelques replays, mais le commun des mortels risque de lâcher l’éponge après quelques raclées bien senties.
Conclusion
Leftovers KO! séduit par son concept absurde, son style visuel charismatique et son humour décalé. C’est une déclaration d’amour réussie aux classiques de la NES, portée par une direction artistique soignée. Hélas, sa difficulté impitoyable et ses mécaniques frustrantes (stamina punitive, Power Punch imprécis, "one round = game over") gâchent l’expérience. Le manque de profondeur (pas de mode histoire élaboré, ni de variété de gameplay) et l’absence d’options de difficulté le réservent aux puristes du genre prêts à enchaîner les game overs.
LES PLUS
- Direction artistique dessiné à la main
- Concept humoristique original
- Fidélité au gameplay Punch-Out!!
- Design des ennemis mémorable
- Interface inventive
LES MOINS
- Difficulté impitoyable
- Système de stamina punitif
- Bruitages peu satisfaisants
- Power Punch imprécis
- Interruptions maladroites
- Absence de modes de difficulté
- Durée de vie limitée









