Dear Me, I Was… est le dernier titre d’Arc System Works. Loin de leurs titres plus percutants à base de quarts de cercle et d’animations dynamiques, nous avons ici une œuvre plus légère et poétique, dirigée par le talentueux Taisuke Kanasaki, célèbre pour son travail sur les séries de jeux d’aventure de Nintendo comme Another Code et Hotel Dusk. Ce titre est une exclusivité pour la Nintendo Switch 2 et se positionne non pas comme un jeu vidéo traditionnel, mais plutôt comme une histoire interactive. Cette distinction est cruciale, car elle définit l’expérience que les joueurs sont en droit d’attendre. Loin des conventions du jeu, Dear Me, I Was… invite à une immersion contemplative, une sorte de petit film animé interactif qui privilégie l’émotion et la réflexion.
Une oeuvre poétique
Le cœur de Dear Me, I Was… réside dans son récit poignant. L’histoire suit le parcours de vie d’une femme japonaise anonyme, de son enfance à sa vieillesse. Le jeu nous plonge dans les moments clés de son existence, explorant un éventail d’émotions universelles : la joie, la tristesse, la confusion, la dépression et l’amour.
Chaque étape significative de sa vie est présentée comme un chapitre distinct, pour un total de dix, incluant un épilogue. Ce qui rend cette narration particulièrement unique, c’est l’absence totale de dialogue. L’histoire est brillamment racontée à travers une combinaison de visuels expressifs et d’une conception sonore évocatrice.
Elle dépeint les hauts et les bas que chacun d’entre nous est susceptible de rencontrer, en particulier dans nos relations avec autrui. De ce fait, Dear Me, I Was… est une œuvre universelle, qui touchera la corde sensible de vos émotions. C’est une exploration intime de la condition humaine, présentée avec une délicatesse rare, par l’équipe majoritairement féminine qui a réalisé ce titre.
L’absence totale de gameplay
Dear Me, I Was… est une histoire interactive plutôt qu’un jeu vidéo au sens strict. Le gameplay est en effet minimaliste et se limite à de très rares moments où vous devrez faire preuve d’interactivité. La majeure partie du temps de jeu, qui dure un peu moins d’une heure, est consacrée à l’observation de scénettes et à l’écoute des musiques accompagnant cette histoire émouvante.
Les interactions se résument principalement à des actions simples : au début de chaque chapitre, vous choisissez les aliments pour le petit-déjeuner de la protagoniste, un geste symbolique qui évolue avec son âge, passant du lait et des fruits à des croissants et du café. D’autres moments interactifs incluent le fait de dessiner des scènes, ce qui implique de maintenir le bouton A enfoncé tout en déplaçant le stick analogique pour révéler des images.
Ces interactions sont si limitées qu’elles semblent parfois avoir été ajoutées pour justifier le terme « interactif ». L’expérience est donc majoritairement passive, invitant le joueur à être un spectateur attentif plutôt qu’un participant actif.
L’art de dessiner une histoire
C’est sans aucun doute dans sa direction artistique que Dear Me, I Was… brille le plus. Chaque scène est dépeinte comme une magnifique aquarelle, un style qui se démarque immédiatement et qui pourrait faire de ce titre un sérieux prétendant au prix du design visuel de l’année.
Les humeurs et les ambiances sont subtilement transmises par la luminosité ou la douceur des couleurs de l’aquarelle. Le travail de Taisuke Kanasaki est sublimé par l’utilisation de la rotoscopie, une technique qui consiste à produire des séquences animées en dessinant image par image sur des prises de vue en direct.
Chaque scène est unique et brève, mais elle parvient à communiquer suffisamment de sens pour contextualiser ce que l’on voit. L’absence de dialogue est compensée par l’expressivité des illustrations et l’utilisation incroyablement intelligente de la couleur, qui contribuent à raconter l’histoire et à toucher émotionnellement les joueurs. La présentation visuelle est tout simplement sublime et constitue l’un des piliers de l’expérience.
Ça vaut une place de ciné ?
Avec une durée de vie de moins d’une heure, Dear Me, I Was… est une expérience courte, trop courte, mais intense. Le contenu se concentre entièrement sur la narration et l’immersion émotionnelle. En raison de son interactivité minimale et de son format linéaire, la rejouabilité est en conséquence très limitée.
Il ne s’agit pas d’un titre que l’on relance pour découvrir de nouvelles voies ou des secrets cachés. Son objectif est de proposer une réflexion unique sur la vie, et une fois cette réflexion menée, l’expérience est accomplie.
Il est important d’aborder Dear Me, I Was… avec les bonnes attentes : ce n’est pas un jeu qui offre des heures de divertissement, mais plutôt une œuvre d’art numérique à consommer en une seule session, un peu comme vous le feriez avec un film. Son attrait est probablement limité à un public très spécifique, ceux qui recherchent une expérience contemplative, poétique et émotionnelle plutôt qu’un défi ludique, ou la recherche d’un gameplay.
Nous ne sommes pas contre ce type d’expérience vidéoludique, plutôt rafraichissante au demeurant, cependant il est nécessaire de se poser cette question : une console de jeu est-elle le support idéal pour proposer à un public de contempler une œuvre visuelle pendant un peu moins d’une heure ?
Dear Me, I Was… est disponible depuis le 31 juillet 2025 sur l’eShop au prix de 7,99 euros, en français.
Conclusion
Dear Me, I Was... est une proposition unique et audacieuse sur Nintendo Switch 2. Ce n'est pas un jeu vidéo au sens conventionnel, mais une œuvre d'art interactive qui se distingue par sa direction artistique époustouflante et sa narration émotionnelle. Les aquarelles de Taisuke Kanasaki et la bande-son au piano créent une atmosphère envoûtante et poétique qui porte une histoire universelle sur la vie et ses épreuves, mais sur laquelle se repose trop le jeu. C'est une expérience qui invite à la réflexion et à l'introspection, un moment de calme. Si vous cherchez une expérience narrative, visuellement sublime et émotionnellement résonnante, et que vous êtes prêt à accepter ce type de format, alors Dear Me, I Was... est une œuvre à découvrir. Si vous recherchez un gameplay avant tout, alors ce titre vous décevra.
LES PLUS
- De sublimes scènes en aquarelle
- Une bande-son au piano qui accompagne parfaitement chaque scène
- Un message profond et universel, sur la vie
- Une narration émotionnelle et brillamment racontée sans dialogue
- Une utilisation intelligente de la couleur pour exprimer les émotions
LES MOINS
- Une interactivité inexistante ou presque
- Une durée de vie trop courte (moins d'une heure)
- Un attrait probablement limité à un public très spécifique
- Ne convient pas à ceux qui s'attendent à un jeu vidéo traditionnel









