Alors qu’un certain Hades II, très attendu par la communauté et notamment sur la console hybride de Nintendo, va bientôt pointer le bout de son nez, on trouve parfois des productions indépendantes d’envergure plus modeste qui parviennent à se démarquer. Towa and the Guardians of the Sacred Tree, un titre développé par Brownies Inc. et édité par le géant Bandai Namco, est l’une de ces propositions. Mêlant l’univers du roguelite et de l’action-RPG, le jeu séduit par son esthétique asiatique affirmée et promet une aventure à la fois enchanteresse et très accrocheuse. Cependant, le jeu révèle un contraste saisissant entre ses ambitions et son exécution, mais offrira-t-il une expérience notable à ses joueurs ? Sera-t-il une alternative honorable à son comparse venu des enfers, Hades ?
Un lore qui colle au genre
L’univers de Towa nous plonge dans un monde enchanteur où se rencontrent l’ambiance du Japon féodal et des éléments de fantasy. Au cœur de cet univers, le paisible village de Shinju est protégé par sa divinité tutélaire, une déesse nommée Towa.
Cependant, le calme est rompu par les assauts de hordes démoniaques menées par un être maléfique, le dieu Magatsu. Malgré sa puissance, Towa réalise que le combat est trop intense pour être mené seule. Elle rassemble alors huit habitants de Shinju, les vaillants Enfants Célestes, dotés de capacités de combat hors du commun.
Si leur première confrontation affaiblit la menace, Magatsu use d’une ultime ruse qui met temporairement en déroute nos héros. Affaiblie et incapable de se rendre sur le champ de bataille, Towa confie sa mission à un duo désigné parmi les Enfants Célestes : le Tsuguri (porteur du katana) et le Kagura (porteur du bâton magique).
Towa conserve toutefois son pouvoir de manipulation du temps et l’utilise pour réinitialiser les événements en cas d’échec, permettant à ses champions de repartir à l’assaut encore et encore. Ce concept est au cœur de la structure roguelite du jeu et justifie par le lore, les innombrables tentatives nécessaires pour progresser, plutôt malin !
Le récit se dévoile de manière progressive, au fil des succès et des échecs, à travers des scènes de style visual novel qui se déclenchent lors des retours au village. Le rythme narratif est donc délibérément ralenti, car même s’il s’agit d’un roguelite, on sent que le studio veut mettre l’accent sur le côté narratif et nous raconter quelque chose.
Une des idées les plus intéressantes du jeu est la façon dont le temps s’écoule pour les habitants de Shinju, qui vieillissent et évoluent de plusieurs décennies entre chaque victoire, tandis que Towa et les gardiens restent immuables.
Ce système permet d’assister à la vie de ces personnages au fil des générations, créant des micro-récits touchants et attachants, ce qui n’est pas pour nous déplaire, et bien au contraire, c’est l’un des aspects les plus appréciables du jeu.
En revanche, force est de constater que le récit principal n’arrive pas à la hauteur de son potentiel. Le grand méchant, Magatsu, est souvent jugé comme un antagoniste dénué de charisme et de profondeur. Il est présenté comme une force malveillante sans visage et sans motif, ce qui rend la lutte moins personnelle et épique qu’elle ne pourrait l’être.
De plus, les dialogues entre les personnages comportent quelques longueurs inutiles et peuvent parfois sembler plats, ce qui peut décourager les joueurs à lire et les inciter à les passer rapidement. L’histoire, bien qu’originale sur le papier, manque d’un certain souffle pour réellement captiver de bout en bout.
La beauté des idées, la faiblesse de l’exécution
La jouabilité est l’aspect le plus polarisant de Towa and the Guardians of the Sacred Tree. Manette en main, le jeu se distingue par la présence d’un binôme de personnages sur le terrain, une mécanique assez unique dans le genre roguelite A-RPG. Avant chaque tentative, le joueur choisit le Tsuguri (le personnage principal) et le Kagura (son soutien). Chaque personnage a ses propres statistiques, et leur rôle détermine leurs capacités et leurs affinités élémentaires.
En solo, le joueur contrôle le Tsuguri tandis que le Kagura le suit, agissant plus ou moins en autonomie. Il est possible de prendre temporairement le contrôle du Kagura, mais cela immobilise le Tsuguri, ce qui est très handicapant dans le feu de l’action. Cette dynamique, qui vise à créer une synergie entre les deux personnages, échoue en grande partie en solo, transformant le Kagura en un petit boulet qui se fait souvent toucher par les attaques ennemies, brisant le rythme frénétique du jeu.
Cependant, le jeu révèle tout son potentiel en coopération locale. Dans ce mode, chaque joueur contrôle un avatar de manière autonome, offrant une expérience de jeu détonante et très amusante. C’est sans doute le point fort du gameplay du jeu, et la composante principale à considérer dans les parties des joueurs.
Un autre élément central est le système de double lame du Tsuguri. Chaque personnage a deux katanas à sa disposition, chacun offrant un style de jeu différent : l’un permet des combos rapides et mobiles, tandis que l’autre nécessite une charge pour infliger des dégâts plus importants. La durabilité de la lame diminue à chaque coup, et il faut changer d’épée pour la régénérer et déclencher une attaque spéciale.
Sur le papier, cette mécanique est ingénieuse et pousse à une alternance de styles de combat, mais dans la pratique, elle est sous-exploitée, puisqu’il est possible d’échanger les épées deux fois de suite en quelques fractions de seconde, ce qui restaure instantanément la durabilité de la lame préférée sans avoir à changer de style. Cette faille rend le système inutile et le combat incroyablement répétitif, mais pourrait sûrement être patchée par les développeurs, qui sait…
Les combats, une fois la mécanique de double lame contournée, se résument souvent à spammer votre attaque favorite donc, et à esquiver les nombreuses attaques de zone ennemies, qui sont clairement indiquées au sol.
Si les débuts semblent laborieux, de prime abord, en mode standard, la difficulté reste malgré tout bien dosée et encourage la persévérance. Toutefois, les combats de boss sont quant à eux, souvent plus injustes en raison de leurs dégâts élevés et de leurs mouvements imprévisibles, ce qui peut mener à de la frustration. Nous avons donc deux salles, deux ambiances.
À noter qu’il existe un mode facile pour que les moins habitués au genre puissent se faire la main tranquillement, mais cela ressemblera bien plus à une balade pour le mode histoire, qu’à une prise en main pour une montée en compétences du joueur.
Comme tout bon roguelite, Towa mise sur une progression constante qui rend chaque tentative significative. Même en cas d’échec, le joueur ramène au village des composants qui servent à débloquer des améliorations permanentes pour ses personnages.
Ces améliorations sont variées et nombreuses : on peut utiliser des points de compétence pour augmenter les statistiques de base comme la vitesse d’attaque et les points de vie, insérer des runes dans le bâton du Kagura pour des bonus passifs, et surtout, forger de nouvelles lames pour le Tsuguri. La forge d’épées est un mini-jeu de type QTE qui influe sur les statistiques et l’apparence de l’arme, et qui procure un sentiment de progression très satisfaisant.
Le village de Shinju est bien plus qu’un simple hub. Il évolue au fil du temps et est le théâtre de nombreuses petites histoires qui se développent sur plusieurs générations. Ces récits, en plus de nous lier aux PNJ, sont la véritable motivation pour continuer l’aventure, car on a hâte de voir comment les personnages évoluent dans le temps.
En plus de la progression principale de l’aventure et celle de vos héros, il existe des activités annexes (comme la pêche) qui ajoutent du contenu. La durée de vie est donc conséquente, car les tentatives se succèdent jusqu’à la victoire finale.
Le manque de variété dans les mécaniques de combat et la prévisibilité des ennemis transforment l’expérience en une petite routine monotone qui ne se renouvelle, malheureusement, pas assez face aux ennemis de base, et qui se révèle frustrante contre les boss.
Quand l’art sublime l’expérience
Les graphismes de Towa and the Guardians of the Sacred Tree sont l’un de ses plus grands atouts et rattrapent largement les faiblesses de son gameplay. L’univers est visuellement enchanteur, avec un style graphique asiatique qui éclate à l’écran. On ressentira des vibes proches d’un Okami, pour notre plus grand plaisir.
Les environnements sont variés, colorés et fourmillent de détails, qu’il s’agisse des biomes exotiques ou du village de Shinju, qui évolue visuellement au fil des générations. Les illustrations des personnages sont magnifiques et le design de chacun des neuf gardiens est également soigné et réussi. Nous avons d’ailleurs un gros faible pour deux personnages en particulier : Bampuku le gros gourmand, et surtout Nishiki l’homme-Carpe Koï.
La partie visuelle est un véritable régal pour les yeux, et nous aimerions franchement que toutes les productions vidéoludiques soient aussi généreuses et appliquées dans ce qu’elles proposent aux joueurs. Le seul petit reproche que nous pourrions faire concerne les arènes de combat, qui manquent parfois de variété et peuvent donner l’impression d’être de simples re-skins des mêmes environnements.
La bande-son, composée par le légendaire Hitoshi Sakimoto, connu notamment pour les compositions musicales des séries Ogre Battle et Final Fantasy Tactics et Final Fantasy XII, est un chef-d’œuvre à part entière, et il n’est pas étonnant de voir que la bande-son est proposée dans l’édition deluxe du jeu.
Les mélodies s’adaptent parfaitement à l’ambiance, offrant des morceaux calmes et apaisants au village, des airs rythmés et dynamiques pendant les combats, et des thèmes épiques lors des affrontements contre les boss. La qualité du doublage est également à noter, contribuant à donner vie à l’univers du jeu.
Towa and the Guardians of the Sacred Tree est disponible depuis le 19 septembre 2025 sur l’eShop au prix de 29,99 euros, en français.
Conclusion
Towa and the Guardians of the Sacred Tree est un jeu aux qualités et aux défauts bien distincts. Il brille par sa direction artistique splendide, son ambiance captivante et sa bande-son envoûtante, qui créent un monde vibrant et attachant. De plus, son système de progression est gratifiant, rendant chaque échec constructif. Cependant, son gameplay solo est moins réussi que le gameplay en duo, centre névralgique de l’expérience de ce jeu. Les mécaniques comme le système de double lame et le duo de personnages sont sous-exploitées (en solo) et peuvent rendre les combats répétitifs. Le Kagura en particulier peut donner l’impression d’un fardeau plutôt qu'un allié, et les affrontements manquent de la profondeur nécessaire. Le scénario principal et le grand méchant sont également en deçà de leurs ambitions. En conclusion, Towa est idéal pour les fans de roguelites originaux, surtout si vous prévoyez d'y jouer en coopération locale, où il s'épanouit pleinement. En mode solo, le jeu reste charmant mais ses lacunes peuvent rendre l'expérience plus laborieuse et monotone.
LES PLUS
- Coopération locale très réussie et au centre du gameplay…
- Direction artistique sublime et une ambiance exceptionnelle
- Bande-son magistrale
- Univers vivant et attachant qui évolue avec le temps
- Progression permanente qui rend chaque tentative utile et gratifiante
- La persévérance est récompensée
LES MOINS
- … Mais le gameplay en solo, lui, est rapidement répétitif
- Mécanique de double lame sous-exploitée
- Des idées de génie mais gâchées par leur exécution
- Le scénario principal manque de profondeur
- Le grand méchant manque cruellement de charisme
- Les combats de base sont trop simples tandis que les boss peuvent sembler injustes









