Vingt-sept ans après le dernier opus majeur, la légendaire série de shoot’em up à défilement vertical, connue sous les noms d’Aero Fighters outre-Atlantique ou Sonic Wings chez nous, fait son grand retour avec Sonic Wings Reunion. Développé par SUCCESS Corporation en collaboration avec HAMSTER Corporation et édité par Red Art Games, ce titre se présente comme une suite fidèle, destinée à raviver la flamme nostalgique des puristes de l’arcade tout en attirant une nouvelle génération de joueurs. Ce nouvel épisode tente de retrouver l’essence même du genre avec un rythme effréné, une difficulté exigeante et une galerie de pilotes aussi excentriques que stéréotypés. Est-ce que l’ambition de moderniser l’image de la franchise tout en maintenant une formule de jeu résolument simple, voire datée, va réussir à percer le cœur des nostalgiques, tout comme celui des nouveaux venus ?
Le retour d’une légende arcade
Si l’on cherche une narration profonde ou des motivations psychologiques complexes, on se trompe de genre. Comme l’exige la tradition du shmup (Shoot’em-Up / jeu de tir), l’histoire de Sonic Wings Reunion n’est avant tout un prétexte amusant et absurde pour justifier de tout détruire.
Le scénario met en scène l’organisation maléfique Fata Morgana, un groupe mystérieux qui a réussi à détourner et à militariser les forces armées terrestres pour semer le chaos à l’échelle mondiale. Pour contrer cette menace, le joueur incarne l’un des membres de l’équipe clandestine Project Blue, une escadrille de « chevaliers du ciel » dont la seule mission est de rétablir l’équilibre en pulvérisant tout ce qui bouge.
La véritable personnalité du jeu ne réside pas dans son intrigue principale, mais dans sa galerie de dix pilotes (huit personnages de départ et des personnages cachés à débloquer). Ces personnages sont volontairement archétypaux et loufoques : on retrouve des figures comme Mao Mao, la pilote japonaise ; Hien, le ninja ; River, le flegmatique gentleman anglais ; ou encore Withy, le très curieux dauphin psychopathe, référence culte de la série.
L’humour est omniprésent, notamment dans les brefs dialogues qui se déclenchent à la fin de chaque niveau. Ces échanges changent en fonction du duo de pilotes sélectionné, offrant un certain charme et une petite rejouabilité narrative, même si ces répliques sont parfois desservies par des traductions françaises bancales, voire des oublis de localisation. L’absurdité culmine avec des injonctions de jeu hilarantes, comme le fameux « GIRD YOUR LOINS » (Prenez votre courage à deux mains) qui annonce le début d’un niveau. L’univers est déjanté et capture l’esprit irrévérencieux de l’arcade japonaise classique.
L’instinct du shmup
Sonic Wings Reunion s’inscrit dans la lignée des shmups nerveux et instinctifs. Sa mécanique de jeu est simple, presque minimaliste, et se concentre entièrement sur les réflexes et le placement. Le joueur utilise uniquement le tir de base (maintenu enfoncé la plupart du temps) et une attaque secondaire, la bombe, qui sert de mécanisme d’urgence ou d’attaque de zone, essentielle face aux vagues d’ennemis.
La prise en main est immédiate, et le titre se joue comme un pur jeu d’arcade d’antan. On note que, sur Switch, le déplacement à la croix directionnelle est souvent préférable au stick analogique, le jeu ne proposant aucune nuance dans le déplacement de l’avion en fonction de l’amplitude du stick.
Le système de power-up est central. En détruisant des formations d’ennemis, on obtient des capsules qui améliorent la puissance de tir jusqu’au niveau 4. Cependant, une mort en pleine action réinitialise le tir au niveau de base (niveau 1). Pour compenser, une capsule verte/jaune, plus rare, permet de retrouver instantanément le niveau de puissance de tir précédent, introduisant une mécanique de gestion du risque intéressante.
L’innovation principale réside dans le système d’ailier (Wingman en anglais). En mode solo, le joueur a la possibilité de choisir un deuxième pilote. Ce dernier n’apparaît pas à l’écran, mais vous pouvez choisir l’attaque secondaire de son avion, qui vient s’ajouter à votre tir de base et à l’attaque secondaire de votre propre appareil, en tant que bombe secondaire (ou « smart boom »).
La difficulté est au rendez-vous, surtout dans les niveaux supérieurs, où le jeu devient un véritable bullet hell. Heureusement, le titre offre la possibilité de vies infinies, le rendant accessible aux néophytes, qui peuvent s’entraîner sans punition ni frustration. Pour les plus assidus, le mode Entraînement personnalisable, permet de décortiquer les patterns des ennemis et des boss.
Un point fort sur Switch est la possibilité de jouer en format vertical (TATE mode), respectant l’affichage original des bornes d’arcade. Cela change grandement l’expérience de jeu ; pour les amateurs, c’est un mode intéressant à condition d’utiliser un support adapté.
Un lifting douloureux
Les graphismes de Sonic Wings Reunion représentent le point le plus clivant et le talon d’Achille du jeu. Le jeu arbore une direction artistique qui tente maladroitement de mélanger le charme 2D classique et des éléments 3D modernisés, pour un résultat visuellement daté.
D’un côté, les sprites des avions et les effets des bombes sont dynamiques et spectaculaires, conférant un certain éclat aux explosions à l’écran. La modélisation des avions et l’énormité des boss sont impressionnantes, en particulier en mode portable.
D’un autre côté, la résolution générale est faible, rappelant l’ère PlayStation 2 ou même PSP. En docké, l’affichage sur grand écran montre une pixellisation grossière qui nuit à la clarté visuelle. Plus problématique encore est la gestion des décors. L’équipe de développement a choisi d’intégrer des éléments 3D et des paysages excessivement détaillés dans le fond. Ce mélange hétérogène donne l’impression que le premier plan et l’arrière-plan sont complètement déconnectés l’un de l’autre, ce qui n’est pas très joli.
Ce choix esthétique a des conséquences directes sur le gameplay. Les arrière-plans surchargés, notamment dans les environnements urbains comme Tokyo ou Barcelone, créent une confusion visuelle involontaire. Dans un jeu de tir où la distinction entre un ennemi, une balle et le décor est vitale, ce choix visuel rend difficile l’identification du danger, d’autant plus qu’une collision avec le paysage est fatale. Le jeu se retrouve ainsi avec une difficulté « non intentionnelle » due à un manque de clarté visuelle.
Malgré tout, le moteur parvient à maintenir une fluidité parfaite, même lorsque l’écran est saturé d’ennemis et de tirs, ce qui est un exploit technique dans ce contexte de densité graphique.
Le fun de l’arcade n’a jamais été aussi cher !
Sonic Wings Reunion vous fera parcourir le monde à travers huit niveaux au total (sept niveaux principaux : Abou Dabi, Barcelone, la Floride, Tokyo, la Guyane, l’océan Arctique, le niveau Fata Morgana, ainsi qu’un niveau bonus en mer Caspienne). Une partie complète se boucle en quinze minutes environ, pour atteindre le générique de fin. Pour réellement faire le tour du jeu, il faudra compter à minima deux boucles consécutives, donc environ trente minutes.
La rejouabilité en tant que telle est très faible ; il faudra être un vrai passionné de la licence et du genre pour rester plus d’une heure sur le titre, ou alors faire plusieurs parties en coop locale avec un proche. Avec ses dix personnages et ses quatre modes de difficulté, il n’y aura pas de quoi rester 30 ou 40 heures sur le jeu.
Toutefois, nous pouvons quand même souligner la présence d’un classement en ligne, pour garder intact l’esprit de la compétition arcade, et surtout le retour de Soshi Hosoi, compositeur emblématique de la série. Le jeu propose donc trois modes audio distincts : le mode standard, avec les chansons composées par S.Hosoi ; le mode « Remix », où vous pourrez retrouver les musiques des anciens opus, entièrement réarrangées pour l’occasion ; et un mode spécial « Mao Mao Attack », avec les chansons du personnage – c’est presque une ambiance karaoké.
Sonic Wings Reunion est disponible depuis le 7 octobre 2025 sur l’eShop au prix de 29,99 euros, en français.
Conclusion
Vendu à un prix plutôt élevé, comparé à des collections de jeux similaires ou à d’autres shmups plus généreux en contenu, Sonic Wings Reunion donne l'impression de livrer une salve de pétards mouillés plutôt qu'un gigantesque feu d'artifice pour son grand retour. Les musiques entraînantes et le système d'ailier apportent une touche tactique appréciable, le tout avec l'option d'un affichage vertical bienvenue pour les fans, sur la Switch. Il est drôle, dynamique et fluide, mais il n’arrive pas à compenser ses défauts. Graphiquement décevant, avec des visuels datés et des décors bien trop chargés qui nuisent directement à la lisibilité de l'action : c’est un péché capital pour un shmup de ce calibre. En fin de compte, Sonic Wings Reunion est un titre qui s'adresse principalement aux collectionneurs et aux inconditionnels de la saga, qui trouveront peut-être ici un prétexte pour se relancer dans une chasse aux meilleurs scores.
LES PLUS
- Jouabilité nerveuse et instinctive
- Un shmup d'arcade au plaisir pur et rapide
- Musiques entraînantes
- Polyvalence tactique grâce aux ailiers
- Mode coop local
- Option de format vertical (TATE)
- Personnages loufoques et décalés
- Le classement en ligne
LES MOINS
- Visuellement daté
- Mélange 2D / 3D maladroit
- Lisibilité à l’écran difficile avec des décors trop chargés
- Durée de vie trop courte
- Prix trop élevé
- Quelques erreurs de traduction









