Lorsqu’on évoque Cruis’n Blast, une phrase revient comme un leitmotiv : « C’est du Cruis’n ! ». Pour les initiés des salles d’arcade des années 90, ces mots résonnent comme une promesse de chaos motorisé et de sensations pures. Développé par Raw Thrills — studio fondé par Eugene Jarvis, le créateur même de la saga originale chez Midway Games — et édité sur Nintendo Switch, ce titre ne se contente pas de raviver la flamme d’une franchise culte. Il l’embrase au nitro, offrant l’une des expériences de course arcade les plus jouissives, décomplexées et électrisantes de ces dernières années.
Un retour tonitruant aux sources
Raw Thrills n’est pas un inconnu dans l’univers du jeu vidéo. Dirigé par Eugene Jarvis (pionnier chez Midway sur des monuments comme Defender ou Robotron 2084), le studio a récupéré la licence Cruis’n auprès de Nintendo pour lancer Cruis’n Blast dans les arcades en 2017. Cette version Switch, sortie bien après, est un retour aux sources symbolique : Jarvis boucle la boucle en ramenant sa création sur une console Nintendo, là où tout avait commencé avec les rumeurs d’un « Ultra 64 » alimentant le premier Cruis’n USA en 1994.
Ne cherchez pas une trame narrative complexe : Cruis’n Blast assume pleinement son héritage arcade. Le but est simple : franchir la ligne d’arrivée avant vos adversaires, enchaîner les boosts spectaculaires et survivre à des circuits déjantés peuplés de dinosaures, de soucoupes volantes ou de yetis. L’ »histoire » se résume à l’énergie pure dégagée par chaque course — un prétexte pour justifier des décors toujours plus fous, comme un London Eye roulant littéralement sur la piste ou un tremplin catapultant votre bolide dans les griffes d’un yeti… avant que le sol ne s’effondre sous vous. Ici, la seule « narration » qui compte est celle écrite par vos cascades.
De la pure adrénaline en boîte
Le cœur de Cruis’n Blast repose sur une philosophie limpide : miser sur l’excès et l’accessibilité. Le gameplay de base s’articule autour de mécaniques simples mais grisantes. Il suffit d’accélérer, d’utiliser le nitro – baptisé ici « Blast » – et de maîtriser la dérive pour déclencher des boosts. Un indice visuel malin, comme la fumée colorée des pneus, permet d’identifier le moment idéal pour maximiser l’accélération après une glissade bien dosée.
L’expérience de jeu mise avant tout sur le spectaculaire. Chaque circuit devient un terrain de jeu explosif où des événements scriptés surviennent en cascade : hélicoptères qui mitraillent l’asphalte, dinosaures surgissant de nulle part pour piétiner la concurrence, routes qui s’effondrent sous vos roues ou tankers lancés dans des explosions hollywoodiennes. Contrairement à un Burnout, ces éléments ne cherchent pas à faire trébucher le joueur, mais plutôt à l’éblouir, à le plonger dans une frénésie visuelle permanente.
Le garage, lui, reflète cette folie assumée. En plus des classiques voitures sous licence comme le Hummer ou la Nissan GTR, le joueur peut débloquer des véhicules totalement délirants : hélicoptère, bus scolaire, ovni, tricératops ou même une licorne. Chacun peut être personnalisé esthétiquement avec des néons, des autocollants ou autres effets flashy. Un système de progression en cinq niveaux permet d’upgrader chaque bolide.
La progression principale se déroule dans le mode « Cruis’n Tour », qui propose 24 pistes inédites réparties sur six coupes thématiques (tempêtes, invasions extraterrestres, etc.), pour un total de 29 circuits. Pour débloquer les circuits suivants et enrichir son garage, le joueur doit collecter les trois clés dorées disséminées dans chaque course et remporter les différentes coupes en décrochant l’Or, avec quatre niveaux de difficulté disponibles.
Simple, efficace, arcade
La prise en main est immédiate : les virages s’enchaînent avec fluidité, les dérives sont intuitives, et les rebonds après collisions généreux. Le jeu privilégie le fun à la simulation — parfois au point de sembler « piloter tout seul » en multijoueur selon un testeur. Mais cette simplicité sert son propos : permettre à tous de savourer le spectacle sans courbe d’apprentissage frustrante. Le « Blast » (nitro) est central : son usage régulier et bien timing est la clé pour dominer les difficultés supérieures.
La bande-son épouse parfaitement l’esprit survolté du jeu : des basses pulsées et des mélodies électroniques entraînantes qui rappellent l’âge d’or des arcades. Les effets sonores — moteurs rugissants, explosions, cris de dinosaures — sont exagérés à souhait, renforçant l’immersion dans ce monde cartoon. Rien de révolutionnaire, mais une alchimie parfaite avec le gameplay.
Le principal point faible de Cruis’n Blast réside dans la brièveté de sa campagne principale. Le mode « Tour », qui constitue le cœur de l’expérience solo, peut être terminé en un simple week-end, avec une durée de vie d’environ 5 à 6 heures. Une fois cette première boucle achevée, la rejouabilité repose sur un système de déblocage méthodique. Les joueurs les plus acharnés peuvent ainsi tenter de récupérer les 87 clés dorées disséminées dans les circuits, décrocher tous les trophées d’Or – y compris en difficulté « Extrême » – et faire progresser chaque véhicule jusqu’à son niveau maximum. Ce chemin vers la complétion totale peut facilement occuper des dizaines d’heures, à condition d’en apprécier la répétitivité.
Le multijoueur, quant à lui, propose un mode écran partagé jusqu’à quatre joueurs, aussi joyeusement chaotique qu’efficace, aussi bien en local qu’en sans-fil. Néanmoins, l’absence totale de mode en ligne vient sérieusement restreindre la longévité du titre pour ceux qui espéraient prolonger l’expérience au-delà du canapé.
Sur le plan visuel, Cruis’n Blast joue la carte du grand spectacle assumé. Sa direction artistique explose de couleurs saturées, de néons scintillants et d’effets lumineux omniprésents. Chaque environnement, qu’il s’agisse de Rio ou de Londres, baigne dans une ambiance fluo, mêlant décors urbains et éléments fantastiques comme des phénix enflammés, des yétis bondissants ou d’immenses robots destructeurs.
Techniquement, le jeu vise les 60 images par seconde et parvient la plupart du temps à s’en approcher. Toutefois, des chutes de framerate viennent ternir l’expérience, surtout lors des scènes les plus intenses, comme les boosts ou certaines séquences multijoueur. Si ces ralentissements n’empêchent pas de s’amuser, ils contrastent avec l’exigence de vitesse qui sous-tend l’ADN du jeu.
Cruis’n Blast est disponible sur l’eShop au prix de quarante euros.
Conclusion
Cruis’n Blast n’est pas un jeu profond. Il ne révolutionne pas la physique des véhicules, son IA triche sans vergogne, et ses circuits sont courts. Mais il réalise quelque chose d’essentiel : il incarne l’essence même du plaisir arcade avec une maîtrise rare. Entre les circuits déments, les véhicules absurdes (course en licorne contre un hélicoptère, vraiment ?) et une jouabilité immédiatement gratifiante, il offre des heures de sourires bêtes et d’exclamations incrédules.
LES PLUS
- Une débauche de set-pieces spectaculaires et inventives
- Une galerie de véhicules complètement folle (dinosaures, licornes, ovnis…)
- Une direction artistique flashy et engageante
- Un système de dérive / boost diablement satisfaisant
- Un multijoueur local hilarant
LES MOINS
- Pas de multijoueur en ligne
- Des performances parfois capricieuses, mais gommées sur Switch 2
- Une campagne solo un peu courte sans les défis annexes
oui a quand une suite et un remake hd de la trilogie