Avatar: The Last Airbender, série animée culte acclamée pour sa narration et ses thématiques matures, méritait un jeu vidéo à sa mesure. Malheureusement, Quest for Balance sur Nintendo Switch trahit cet héritage. Développé par Bamtang Games et édité par GameMill Entertainment, ce titre se présente comme une adaptation 3D des trois saisons de la série, mais sombre dans les travers des licences bâclées : gameplay désuet, incohérences narratives, et technique défaillante. Un échec cuisant pour les fans comme pour les novices.
Revisiter l’histoire… en mode parodie
Bamtang Games, studio derrière ce projet, semble avoir été écrasé par le poids de la licence. Malgré une ambition affichée (18 chapitres couvrant l’arc narratif complet, 9 personnages jouables), l’exécution révèle des ressources limitées et une méconnaissance des attentes des fans. Le résultat est un jeu qui ressemble à un produit mobile upscalé, loin des standards actuels.
Quest for Balance propose de revivre les moments clés de la série à travers les yeux d’Aang et du Team Avatar. Le cadre narratif – des membres du Lotus Blanc racontant l’épopée – aurait pu être ingénieux, mais il sert surtout à justifier les ellipses brutales et les incohérences. Des épisodes fondateurs (comme le duel contre Bumi) sont résumés en quelques lignes de texte, tandis que des scènes anecdotiques (comme la collecte de grenouilles) deviennent des niveaux entiers. La chronologie est chamboulée, les boss (comme Zuko) sont réutilisés à l’identique, et le climax mythique du combat contre l’esprit Hei Bai est… réduit à un puzzle de blocs.
Un festin de médiocrité
Le système de combat repose sur un button-mashing rigide et imprécis, où les pouvoirs des maîtres de l’eau, de la terre ou du feu n’apportent aucune profondeur tactique. Les hitboxes sont incohérentes, les ennemis – qu’ils soient simples bandits ou bendeurs – se ressemblent tous, et les chutes incessantes transforment chaque affrontement en épreuve de patience. L’équilibrage laisse à désirer : Sokka, pourtant non-bendeur, devient paradoxalement le personnage le plus puissant du jeu grâce à une compétence d’immunité aux chutes, soulignant le désordre général du système.
Les énigmes, censées structurer l’exploration, se résument à déplacer des caisses ou à positionner des torches, souvent dans des situations absurdes où sauter devient interdit. Les quêtes secondaires n’apportent rien, se limitant à de simples livraisons ou collectes d’objets anecdotiques. Le titre n’hésite pas à recycler sans subtilité ses propres mécaniques : des séquences façon Temple Run peu fluides, des mini-jeux mal intégrés, et des puzzles de blocs qui se répètent à l’infini sans évolution ni surprise.
L’arbre de compétences, alimenté par les pièces de Pai Sho collectées au fil de l’aventure, semble au départ prometteur. Pourtant, il perd vite de sa pertinence, les combats se résumant à marteler les mêmes attaques sans réel besoin de stratégie. Certains personnages, comme Suki ou l’Esprit Bleu, donnent l’illusion d’une personnalisation intéressante, mais s’avèrent être des impasses : une fois disparus du scénario, tout investissement dans leurs compétences devient inutile.
Un cauchemar ergonomique
Sur Nintendo Switch, la maniabilité est tout simplement catastrophique. La caméra, fixe ou semi-rigide selon les séquences, coupe régulièrement l’action et rend la navigation laborieuse, voire frustrante. Les contrôles manquent cruellement de précision : la sensibilité est approximative, les personnages se retrouvent facilement coincés dans les décors, et le système de verrouillage des cibles peine à fonctionner correctement, compromettant encore davantage les combats. Le multijoueur local, pourtant mis en avant, est pratiquement inutilisable : le second joueur ne peut contrôler son personnage de manière fluide, ce qui ruine totalement l’expérience en coopération.
La partie sonore constitue quant à elle une offense à l’univers de la série. Le doublage est quasi inexistant durant les phases de jeu, limité à quelques cinématiques, et les rares voix présentes peinent à convaincre : les personnages emblématiques comme Iroh ou Bumi sont affublés de doublures sans charisme ni émotion. La bande-son se contente de recycler les thèmes connus de la série sans la moindre touche d’originalité ou de réinterprétation. Les effets sonores, quant à eux, semblent tout droit sortis de jeux bien plus anciens, parfois même évoquant The Legend of Zelda, sans que cela ait le moindre lien stylistique ou cohérence, ce qui achève de décrédibiliser l’ensemble sonore du jeu.
9 heures de purgatoire
Il faut compter environ neuf heures pour venir à bout des dix-huit chapitres que propose le jeu. Cette durée est artificiellement allongée par du remplissage peu engageant. La rejouabilité repose principalement sur la possibilité de revisiter les niveaux avec l’ensemble des personnages débloqués afin de récupérer des objets de collection, mais cette mécanique s’avère rapidement fastidieuse. Viennent s’ajouter dix-neuf épreuves bonus censées varier l’expérience, mais elles se révèlent tout aussi peu inspirées que le reste du contenu. Dans l’ensemble, aucune véritable motivation ne pousse à persévérer dans une aventure aussi punitive et déséquilibrée.
Graphiquement, le jeu semble faire un bond en arrière. Les décors en 3D et les modèles cell-shadés tentent d’imiter le style visuel de la série animée, mais l’ensemble évoque davantage un jeu PlayStation 2 ou GameCube maladroitement upscalé. Les environnements sont vides, linéaires, et manquent cruellement de détails. Même si quelques variations de biomes sont proposées, comme les villages de la Tribu de l’Eau ou les villes du Royaume de la Terre, elles peinent à masquer la redondance des décors. Les animations sont catastrophiques : la glace qui fond n’est qu’une simple image PNG qui se rétrécit, les objets lancés ignorent toute logique physique, et les personnages interagissent de manière grotesque avec leur environnement. Les incohérences s’accumulent, comme ces personnages féminins tous copiés-collés sur Katara, ou ces PNJ qui « creusent » sans pelle. Le summum étant atteint lorsqu’un maître de l’eau meurt instantanément en tombant… dans l’eau.
Sur le plan technique, le jeu est un désastre. L’intelligence artificielle alliée est totalement inefficace : les coéquipiers foncent sur les ennemis sans jamais attaquer, devenant des fardeaux plutôt que des soutiens. Les bugs sont nombreux et récurrents : dégâts invisibles, objets qui tombent en dehors de la carte, boutiques qui figent l’écran ou empêchent toute progression. L’économie du jeu est quant à elle complètement brisée, puisque certaines potions de soin peuvent être revendues plus cher qu’elles ne sont achetées, rendant la collecte de pièces totalement inutile. Ces problèmes cumulés achèvent de saborder un titre déjà fragile sur tous les autres plans.
Conclusion
Avatar The Last Airbender : Quest for Balance est une insulte à la licence. Entre son scénario malmené, son gameplay archaïque, ses graphismes datés et ses bugs omniprésents, il échoue sur tous les fronts. Les fans y verront une trahison, les novices une incompréhensible pagaille. À 39,99€, c’est un investissement absurde quand la série originale est accessible partout.
LES PLUS
- Il se lance sur la console
LES MOINS
- Combats en button-mashing imprécis, hitboxes incohérentes, équilibrage désastreux
- Énigmes répétitives, quêtes secondaires insignifiantes
- Mini-jeux mal intégrés et peu fluides
- Arbre de compétences inutile
- Narration incohérente et irrespectueuse
- Scènes cultes résumées en texte
- Chronologie chamboulée
- Caméra incontrôlable et bloquante, contrôles imprécis, personnages coincés dans les décors
- Multijoueur local "inutilisable"
- Dégâts invisibles, objets hors map, boutiques qui figent l'écran
- Graphismes datés et animations grotesques
- Décors vides et linéaires
- Animations ridicules
- Doublure quasi absente en jeu
- Bande-son recyclée sans originalité, effets sonores anachroniques et incohérents
- Durée de vie allongée par du remplissage
- Rejouabilité fastidieuse
- Économie du jeu brisée (potions revendues plus cher qu'achetées)
- Coéquipiers inutiles en combat