En 2020, Hades avait bouleversé le paysage vidéoludique en amenant le roguelike, souvent considéré à l’époque comme un genre niche, sur le devant de la scène mondiale. Cinq ans après, le studio américain Supergiant Games (Bastion, Pyre) fait un pari risqué en nous proposant sa suite. Hades II, après plus d’un an d’accès anticipé, arrive enfin sur PC et en exclusivité console Nintendo Switch (1 et 2). Que nous donne ce titre disponible sur l’eShop au prix de trente euros depuis le 25 septembre 2025 ?
On reprend les mêmes et on recommence
Hades II se déroule une vingtaine d’années après le premier opus. L’Enfer a été dévasté par le Titan Cronos, bien motivé à faire payer aux dieux l’exil qu’il a subi par le passé. Au milieu de ce monde ravagé, nous incarnons Mélinoé, fille d’Hades et de Perséphone qui fut sauvée en bas âge à la dernière minute par Hécate. Réfugiée dans un camp entre le monde des Enfers et la surface, désormais âgée d’une vingtaine d’années, Mélinoé s’apprête à descendre jusqu’au Tartare afin de tuer Cronos et retrouver sa famille.
Hades II ne révolutionne pas la recette qui a fait du premier titre un succès. Nous sommes toujours dans un roguelite dungeon crawler à forte propension narrative. Nous devons survivre dans des salles remplies de monstres jusqu’au boss final.
L’architecture du jeu est presque la même que celle du premier opus. Notre personnage se déplace de zone en zone. Chaque zone comporte un boss et plusieurs salles. Nous aurons la plupart du temps le choix de la salle où nous voulons aller : allons-nous plutôt prendre la récompense alléchante quitte à affronter un ennemi élite (des sortes de mini-boss), ou bien allons-nous choisir la sécurité ?
Sur notre chemin, les dieux de l’Olympe viendront nous aider en nous offrant des bienfaits aux pouvoirs variés qui nous permettront de devenir de plus en plus puissants. Dans Hades II, nous avons un mélange astucieux d’anciens dieux du précédent opus et de nouveaux.
Nous retrouvons par exemple Poséidon, avec ses talents aquatiques qui nous permettent d’éloigner les adversaires, mais nous pouvons aussi découvrir Héphaïstos, capable de nous donner de puissantes attaques explosives et de l’armure.
Nous allons encore nous battre avec notre attaque, notre technique, ainsi que notre élan pour esquiver les coups (ce dernier a été repensé). Le jeu abandonne cependant les lancers pour les remplacer par des glyphes. Ces derniers sont des zones que nous plaçons à nos pieds, qui, en fonction des dieux, peuvent infliger de lourds dégâts et bloquer les ennemis.
Nous avons des coups puissants pour les trois capacités offensives, appelés coups « Ω » (oméga). Ces derniers coûtent des « Ω » (sorte de mana) et peuvent créer des ensembles dévastateurs capables de décimer une salle. Autre nouveauté, nous avons la possibilité d’acquérir un sort aux effets aussi bien offensifs que défensifs.
Une suite qui améliore chaque aspect du premier opus
Ces sorts, améliorables, se rechargent en dépensant un certain nombre de mana. Il faut donc intelligemment jongler avec ces deux nouveautés (coups Ω et sorts) pour avoir son sort tout en gardant du mana pour réaliser des coups puissants.
Hades II propose six nouvelles armes aux mécaniques variées. Le sceptre de sorcière est par exemple une arme assez « équilibrée ». Ni trop lente, ni trop rapide, elle ressemble à une lance qui permet à la fois de se battre au corps à corps et à distance. À l’inverse, le crâne d’argent s’utilise comme des puissantes grenades que nous lançons sur l’ennemi. Très utile pour les dégâts de zone, elle nécessite une mobilité constante pour récupérer nos munitions laissées sur les cadavres de nos ennemis.
À ces nouvelles armes s’ajoutent de nouvelles techniques à débloquer le temps de la run qui peuvent radicalement changer le cours de la partie. Pour le sceptre, nous pourrons aussi bien avoir une attaque plus puissante mais qui coûte plus de Ω, intéressante à jouer avec un sort, ou bien une technique qui rebondit sur les adversaires, très pratique avec certains bienfaits comme ceux de Zeus.
Les souvenirs, ces objets que nous équipons avant chaque partie, sont toujours là. En revanche, le miroir a disparu et a laissé place à une mécanique de cartes de tarot. Chaque carte de tarot possède un pouvoir et un coût et c’est à nous de créer l’ensemble qui nous convient le plus. Allez-vous forcer le destin en modifiant les récompenses de chaque salle ou bien allez-vous plutôt créer un build défensif capable de vous soigner au fil de la partie ?
Le hub, l’endroit où nous passons du temps entre chaque partie, ressemble à celui du premier opus… mais il est totalement différent. Nous avons un chaudron qui nous permet de confectionner de nouveaux éléments, à la fois pour améliorer notre base mais aussi pour restaurer les Enfers.
L’argent a aussi totalement évolué : nous pouvons toujours pêcher, mais la plupart des objets (ainsi les cartes de tarot) nécessitent des matériaux que nous récupérerons dans les Enfers, que ce soient des graines (que nous planterons dans notre camp), du minerai ou des artefacts laissés par les boss.
Un gameplay conséquent et profond
Les cartes de tarot nécessitent des cendres, la capacité pour avoir plus de cartes de tarot nécessite de la psyché et nous pouvons aussi récupérer des ossements et des fils du destin (en réalité, il y a d’autres éléments à débloquer plus tard).
Ce qui fait le sel d’Hades (I comme II), ce sont les personnages que nous rencontrons au fil de notre aventure. Outre les dieux olympiens, ce deuxième opus propose encore une galerie de personnages aux personnalités variées, du pragmatique Ulysse à la très conflictuelle Nemesis (nous ne parlons que des personnages du hub pour vous laisser le plaisir de la découverte). Nous pouvons augmenter l’amitié avec quasiment tous les personnages rencontrés, qu’ils soient adjuvants ou non, ce qui nous permet d’en découvrir un peu plus sur eux au fil de l’aventure.
Le gameplay du premier Hades frôlait déjà la perfection… Mais que dire de celui du deuxième opus, qui l’améliore en tout point ? Le jeu est nerveux, exigeant, technique, difficile mais en même temps accessible pour les néophytes.
Le level design est impeccable, avec des zones variées aux défis qui se renouvellent. Que ce soient les jets d’eau qui nous étourdissent à Océanos, les troncs d’arbre qui nous aident à tuer les ennemis à l’Érèbe en passant par les pièges « ensevelis » du Tartare, chaque zone nous amène à réfléchir et à nous comporter différemment en fonction de la difficulté.
Les ennemis, comme les boss et les élites, sont soignés. Chaque adversaire rencontré nous a donné du fil à retordre. Sans entrer dans les détails pour vous laisser le plaisir de la découverte, nous avons particulièrement détesté (dans le bon sens du terme) Oh-Oh que nous avons maudit à plusieurs reprises.
Des nouveautés à la pelle
Scylla est rapidement devenue l’un de nos boss préférés du monde vidéoludique, que ce soit par son concept intimement lié à la musique ou tout simplement sa personnalité qui nous donne envie de l’affronter encore et encore.
Les bienfaits, comme les armes, sont tous intéressants et offrent de longues heures de jeu en perspective pour tout maîtriser ou même juste pour trouver son build parfait. Même si nous adorons Héphaïstos avec le sceptre, nous savons que notre cœur pourrait rapidement flancher en maîtrisant une autre arme.
Il y a un vrai plaisir la première fois que nous vainquons Cronos, presque exutoire, à la hauteur des efforts consentis pour apprendre les ennemis et leurs patterns. Pour beaucoup de jeux, vaincre le boss final représente d’ailleurs la fin de l’aventure, cependant, dans Hades II, nous en sommes encore très loin (nous omettons là encore volontairement certains points pour ne pas gâcher la découverte).
Le jeu est généreux dans son contenu, et nous avons toujours la sensation de découvrir de nouvelles choses. Que ce soient les nouveaux personnages, les nouveaux dieux (et les bienfaits qui vont avec), les nouvelles armes que nous débloquons, les améliorations « post-Cronos », ou même la gestion de notre hub, Hades II offre une masterclass qui surpasse le premier opus à bien des égards (et là encore, nous avons fait le choix de vous parler du jeu en essayant de vous laisser le plaisir de la découverte).
Pour être honnêtes, nous avions des réserves en lançant le jeu ; comment réussir à passer après Hades sans abîmer nos beaux souvenirs ? Supergiant Games a balayé nos doutes et signe la suite idéale qui réussit à être novatrice et en même temps généreuse en « fan service ». L’expérience, dans le fond, est la même que celle du premier opus mais d’un autre côté, elle est radicalement nouvelle. Les glyphes comme les sorts modifient la façon de jouer, de se déplacer et d’appréhender les ennemis.
Un scénario maîtrisé et aux personnages attachants
Les développeurs distillent habilement des références au premier opus çà et là pendant l’aventure. Si le jeu est totalement accessible pour un néophyte (au prix de quelques runs en plus pour vaincre Cronos), les fans du premier opus se régaleront tout au long de l’expérience avec ces clins d’œil intelligemment placés dans le récit.
Scénaristiquement, par ailleurs, Hades II est une nouvelle masterclass avec une réécriture moderne de la mythologie grecque réussie pour Supergiant Games. Si le jeu est intrinsèquement moins bien écrit que le premier opus, avec quelques personnages moins prenants (ils sont tout de même excellents, voir prochain paragraphe) nous restons tout de même face à une référence pour tous les apprentis auteurs de la planète.
Les personnages sont excellents, avec des personnalités variées et nous sommes sûrs que vous aurez vos préférés au fil du jeu. Pour notre part, nous avons adoré Scylla et Nemesis et eut énormément d’empathie pour Echo, mais il est tout à fait possible que vous ayez un coup de cœur ailleurs tant la galerie de personnages est complète et bien écrite.
Hades II déploie une habile structure autour du temps et de la famille, et chaque personnage incarne à sa façon un pan de la thématique. Le rythme dramaturgique est parfaitement maîtrisé, sans temps mort, et nous plonge d’emblée dans un récit aux nœuds dramatiques forts qui nous donnent envie de retourner sur le jeu encore et encore.
La durée de vie dépendra énormément de votre implication, mais elle se compte en dizaines d’heures de jeu. Allez-vous vous arrêter après les crédits de fin ? Après avoir tout débloqué ? Vous pouvez facilement passer de trente à une centaine d’heures de jeu en fonction de vos envies.
Hades II est peut-être l’un des roguelites les plus chers du marché avec ses trente euros (cinq de plus que le premier opus). Le prix est cependant totalement justifié. Outre la durée de vie colossale, le jeu propose un contenu bien supérieur à ce que nous pourrions attendre d’un jeu à ce tarif.
Une masterclass musicale… encore une fois
Après Hades, nous considérions Darren Korb comme l’un des plus grands compositeurs de son époque. Hades II n’a fait que confirmer notre impression avec une bande-son, au bas mot, merveilleuse, enregistrée pour certaines parties dans le non moins iconique Abbey Road. Les pistes s’enchaînent dans un éclectisme maîtrisé allant de l’électro au rock en passant par la musique épique.
La piste sonore est parfaitement insérée dans le jeu et nous présente là encore une masterclass pour tous les compositeurs en herbe. Darren Korb réussit lui aussi à faire des clins d’œil astucieux au premier opus qui raviront les joueurs. Et comment ne pas citer la diss song de Scylla, amusante et à la fois entraînante ?
Le doublage est lui aussi parfaitement maîtrisé. Les comédiens de doublage sont tous convaincants dans leur rôle. Judy Alice Lee, voix de Luna Snow dans Marvel Rivals ou Monique dans le très drôle Date Everything!, est excellente dans le rôle de Mélinoë. Nous n’allons pas nommer les comédiens un par un mais l’ensemble du casting est maîtrisé.
Les graphismes sont superbes, avec une sublime direction artistique qui réussit même à nous éblouir par moments. Hades II propose une véritable « refonte » des personnages lors des dialogues ce qui est vraiment appréciable pour l’expérience. Certains passages plus contemplatifs réussissent encore une fois à nous impressionner.
Notons les quelques améliorations de confort ajoutées dans ce nouvel opus. Le jeu est plus « lisible », et nous pouvons désormais accéder très rapidement à notre build. Les statistiques de fin de partie sont aussi plus complètes, ce qui renforce notre satisfaction et permet de mieux comprendre ce qui a fonctionné et nos points d’amélioration.
En termes de portage, la version d’Hades II sur Nintendo Switch 2 est parfaite. Techniquement, il n’y a vraiment rien à redire, hormis un mini-bug sans impact sur notre partie où un boss est resté bloqué à l’extérieur de la carte pendant dix secondes. Hades II livre une performance parfaite permettant aux joueurs possédant une Nintendo Switch 2 (sur la première du nom, l’expérience est bridée) de s’amuser comme les joueurs PC.
Petit avertissement malgré tout, car même si les perceptions autour du roguelite ont évolué depuis la sortie du premier Hades, certains joueurs pourraient être frustrés par l’expérience. Ceux qui n’aiment pas perdre en boucle ou qui n’aiment pas le roguelite resteront hermétiques à ce jeu qui pourraient leur paraître répétitif. Étant donné son statut de suite, Hades II est moins « marquant » que le premier car plus attendu, mais ce n’est pas vraiment une critique tant la qualité est au rendez-vous.
Nous vous joignons une vidéo de près de cinquante minutes réalisée au début de notre expérience afin que vous puissiez voir si le jeu vous plaît… sans divulgâcher l’histoire.
Conclusion
Hades II est la suite rêvée. Sans révolutionner la recette qui a fait du premier opus un succès, Supergiant Games réussit à améliorer chaque aspect de l’expérience pour créer un jeu proche de la perfection. Avec son gameplay nerveux et profond, son contenu plus que généreux, sa durée de vie dantesque, sa bande-son et ses graphismes exceptionnels, son scénario à l’écriture maîtrisée et aux personnages attachants, Hades II est sans aucun doute l’une des plus grandes réussites de 2025 aux côtés de Hollow Knight: Silksong et Clair Obscur: Expedition 33. Hades tutoyait l’Olympe, Hades II, lui, a dépassé les sommets.
LES PLUS
- Une suite qui améliore chaque aspect du premier opus
- Un gameplay technique, nerveux, et profond
- Une progression parfaitement distillée
- Un contenu colossal
- Une durée de vie impressionnante
- Une masterclass musicale, encore une fois
- Un casting convaincant, peu importe le rôle
- De magnifiques graphismes
- Une écriture maîtrisée du début jusqu’à la fin
- Scylla et sa diss track, notre coup de cœur
- Un jeu qui réussit des clins d’œil habiles au premier opus
- Et tellement d’autres choses qui font de ce Hades II une référence…
LES MOINS
- Ceux qui n’aiment pas le roguelite trouveront l’expérience répétitive
- Moins “marquant” que le premier opus









